Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



lundi 24 février 2014

Les Marionnet ont-ils un secret ?

En soi, Marionnet est une expérience. Avec son élégance des années 70, il est absolument parfait, complètement décalé. Un type long et sec, un sourire de crooner, la mèche bien plaquée, ses convictions à la boutonnière, l’œil bienveillant et rieur. Au creux de l’hiver, dans sa campagne humide, les bosquets décharnés et les haies à trous, il a la difficile mission de vous enthousiasmer. Pourtant, dans une ouate de saison, la plaine est désespérante et si vous avez fait le trajet jusque là, c’est que vous avez une bonne raison. Les corbeaux, eux, volent à l’envers.

Henry Marionnet est un inventeur. Au contraire de tout le monde et depuis le début de son épatante carrière, il a développé des théories et les a mises à l’épreuve du réel. Ce n’est pas un bavard, pas plus un « communicant ». C’est un garçon simple qui a hérité de la terre de son père après moult péripéties — le vieux n’était pas facile, facile — et qui a propulsé son vin tout en haut de l’affiche préférée des amateurs, le tout sans convoquer la cour et la campagne à tout bout de champ. Non. Marionnet n’a eu pour seuls ambassadeurs que son vin, ses vins, ses idées, ses expériences réussies. Encore fallait-il s’intéresser, aller à lui puisqu’il ne faisait pas le voyage. Beaucoup l’ont fait, ont assuré sa gloire, j’arrive le dernier.

Henry et Jean-Sébastien, les Marionnet père et fils, par temps froid


Nous sommes à Soings-en-Sologne à vingt kilomètres de Blois. L’extrême est de l’appellation Touraine. Là, Henry Marionnet et son fils Jean-Sébastien (c’est lui, le chef maintenant) exploitent 60 hectares de vignes. Mais les Marionnet sont joueurs. Six de ces hectares sont plantés en vignes dites franches de pied. C’est-à-dire sans porte-greffe, comme autrefois, comme avant la grande crise du phylloxéra. 10 % de son vignoble est assis sur un volcan. Éteint, certes, mais capable de se réveiller à tout moment. En général, il faut huit à dix ans au phylloxéra pour repérer la bonne affaire et détruire les « francs de pied ». Pas chez lui. À quoi ça rime de prendre des risques pareils ? On l’écoute : « J’ai voulu comprendre ce que buvaient nos aïeux, ceux du XIXe siècle. À la quatrième feuille (au bout de quatre ans, NDLR), c’était clair. C’est une classe au dessus à tous égards. Complexité, matière, arômes, une race éclatante. J’aimerai planter mes 60 hectares comme ça, mais je ne peux pas faire courir le risque à ma famille de voir tout mon vignoble ravagé. C’est notre seul gagne-pain. »
Dans le même ordre d’idées et depuis 1990, il a créé une gamme de vins sans soufre ajouté qu’il a nommé Première vendange. Sur l’étiquette, il n’y a pas écrit « contient des sulfites ». Mon Dieu, ce rebelle. Nous en rions. Il ne dira pas ses secrets. Pas directement, merci de comprendre. Nous comprenons surtout que le chai est un modèle de propreté et lui, un bourreau de travail. Il n’y a pas de secret, finalement. Il dit : « Faire du sans–soufre est un gros risque. Il faut vraiment maîtriser la vinification si on ne veut pas être obligé de tout mettre à l’égoût. La loi impose d’étiqueter à partir de 10 mg/l de SO2 total. La quantité de soufre issue de la vinification oscille entre 0 et 3 milligrammes. Si il y en a plus, c’est que le vigneron en a ajouté. Nous avons plus de vingt ans d’expérience, je sais de quoi je parle. La différence entre vinifier avec du soufre ou sans, c’est que sulfiter fait que seules les levures les plus résistantes travaillent. Quand on ne sulfite pas, toutes les levures travaillent. C’est ce qui donne cette profondeur et cette complexité supérieures. »

Pour autant, le vignoble des Marionnet n’est pas mené en bio. N’est plus mené en bio, en fait. Le père d’Henry Marionnet pratiquait une viticulture bio intégrale, il travaillait « au cuivre et au cheval », c’était il y a très longtemps et quand Henry a finalement repris les rênes du domaine, il a mis un terme à cette pratique. Quelle mouche a bien pu le piquer ?




Lire la suite de ce portrait, l'avis de Michel Bettane et un bon nombre de commentaires et notes de dégustation sur MyBettaneDesseauve.fr, ici

La photo : portrait d'hiver par Armand Borlant

7 commentaires:

  1. Un exemple parfait d'une famille de vignerons qui a autant le souci d'une qualité supérieure des crus proposés qu'une politique de prix méritant en la matière un Nobel du RQP.

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    1. Absolument, c'est une dimension importante. Les vins des Marionnet ne sont pas chers du tout.

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  2. Aaaahhhh toujours cette histoire de "sans-soufre"... Mais on n'en a pas fini avec ce mythe debile!??? Alors j'aimerais bien savoir ce qu'ils font pour ne pas en mettre. Des macerations carboniques? De la cuve inox? C'est pas bon!

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  3. Je ne parle pas des vins des Marionnet mais du "sans-soufre" en general. Et j'en ai bus!

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  4. A l'ami Mauss, je suggère d'ajouter le "P" de plaisir à son "RQP"... Le Henry Marionnet, connu voilà des lustres chez Jean Nouyrigat au "Père Tranquille" avenue du Maine et, aujourd'hui le Jean-Sébastien qui imprime sa marque sous l'oeil tendre de son père. Voilà une belle famille... PS - Mais où donc trouve-t-on la suite du papier ?

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